Chercher de nouveaux soleils.
▲ Compte-rendu de la conférence d'Estelle Pom et Loraine Furter. ▲ 08.12.2020 ▲ Esthétique décoloniale, féminisme & design graphique.
L’autre soir, la tête appauvrie par l’avarie de rencontres et la sécheresse de la vie culturelle, sentant mon cerveau dangereusement déshydraté, j’ai décidé de prendre les choses en mains et d’assister à une conférence en ligne au titre énigmatique : « chercher de nouveaux soleils », d’Estelle Pom et Loraine Furter.
La conférence eut l’effet escompté de me redonner le petit coup de boost nécessaire au redémarrage de mes neurones. Compte-rendu. Mais de quoi avons-nous parlé ? Écologie. Intersectionnalité*. Décolonisation*. Féminisme. Notre époque porte ces questions, plus brûlantes que jamais. Autrefois marginales, elles sont aujourd’hui vitales et interdépendantes. Qu’on décide de les ignorer ou qu’on lutte pour, nous y sommes forcément confronté.Es en tant que designer.euses. Mieux, ces problématiques viennent nourrir un champ du graphisme qui est peu remis en question et qui, toujours, est pensé au travers le prisme de règles établies dont on peine à faire bouger les lignes. On dit, à raison, que le graphisme aime regarder le graphisme ; mais il aurait tout à gagner à regarder au-delà et à intégrer des questionnements “extra-design”, parfois plus souterrains. “Change of signs is the sign of changes” (le changement dans les signes, est le signe du changement), et lae designer.euse a bel et bien une responsabilité concernant ces questions. En effet, aucune image n’est neutre, aucune tendance graphique n’est anodine et décorrélée de son contexte social. Faire du graphisme, c’est faire des choix : typographies, images, textes… la composition qui juxtapose telle image à telle typographie, n’invoquera pas les mêmes imaginaires qu’une autre image, avec une autre typo, organisé dans le format d’une autre manière… Alors, comment prend-on certaines décisions et qu’est-ce qu’elles impliquent ?
Certes, nous sommes souvent contraint.es par des aspects financiers, et appliquer un processus de création en tout point éthique dans une activité de design est une mission très ambitieuse. Toutefois, prendre conscience que lae designer.euse peut jouer un rôle, c’est un début. Nous avons, en tant que designer.euses, un vrai devoir de redistribution des connaissances et d’accès au savoir. Par là, nous sommes responsables ou à défaut complices des inégalités que nous contribuons à véhiculer. Encore une fois, une image n’est jamais neutre. La conférence menée par Estelle Pom et Loraine Furter pose un constat simple et urgent : il faut défaire les canons et représentations hégémoniques*.
Le design graphique fait partie intégrante de cette lutte. Mais en quoi, et comment pouvons-nous en faire un outil ?
Le design a toujours eu un lien avec le pouvoir, en cela que savoir = pouvoir. Le savoir tel qu’il est enseigné à toujours évolué dans des sphères privilégiées. On le constate avec l’invention de l’imprimerie et comment elle a contribué à diffuser et imposer les textes religieux au-delà des frontières. La splendeur des lettrines et des compositions typographiques (yes, on peut dire que les moines étaient graphistes) parle d’elle-même. Tout est grandiose, riche, merveilleux, tout est là pour fasciner et soumettre (convaincre). La bible de Gutenberg est un véritable outil de croisade. Aujourd’hui, rien n’a changé de ce point de vue. Les designer.euses contribuent donc, bon gré mal gré, à organiser les rapports de forces entre les gens “sachants”, et les autres, ceux qui vont avoir accès une information parce qu’on utilise leurs codes, et les autres.
Aujourd’hui, quelles sont les formes de pouvoir existantes qui organisent les rapports de forces ? Et surtout comment le design peut aider à les renverser ?
Une méthode très efficace est de s’approprier les fonctionnements et outils pour les faire siens. J’avais pu étudier la manière dont des populations se réappropriaient leur quartier après avoir créé une cartographie sensible, alors que la manière dont on avait étudié leurs espaces, dont on avait cartographié et organisé leurs territoires dans une démarche de colonisation, avait pour but de leur enlever tout autonomie. *futur article à venir*
Ici, E. Pom s’est surtout intéressée à Twitter, et c’est ce dont elle nous a parlé. Mais pourquoi Twitter?
Nous pouvons l’affirmer : tout est design. En effet, chaque chose que l’on voit ou utilisons, objets, plateforme ou logiciel, a fait l’objet d’une étude d’utilisation, d’ergonomie, de fonctionnalité, lisibilité, etc… autant d’attributs propres au design. De plus, le design graphique ne fabrique pas des images vides. Il y a tout un système de valeurs, des principes, des théories, des messages, des règles sous-jacentes… qui structurent les images et organisent la pensée, qui disent quelque chose de l’image, dans l’image. Les réseaux sociaux n’échappent pas à ce principe, bien au contraire. Twitter est un réseau social de prime abord inoffensif, en faveur de la circulation d’informations entre les individus. Pour certain.es, il est un vrai outil de construction d’identité, comme en parle Lou de @la.charge.raciale, asiatique adoptée, qui a pu y retrouver une communauté vietnamienne avec laquelle partager, et donc (re)construire des repères culturels pour renouer avec son pays d’origine. Mais ce sont des micro-bulles et lorsqu’on n’a pas d’usages spécifiques, nous sommes noyé.es dans les informations par défaut les plus relayées. D’ailleurs Lou a vite été dégoûtée par la toxicité du réseau.
Par ailleurs, le fonctionnement que propose Twitter repose sur des prises de paroles courtes, favorisant davantage le réseautage et les news brûlantes. En limitant le nombre de caractères, on encourage les propos courts et incisifs au potentiel agressif et réactionnaire. Plus c’est court, plus le risque de sophisme* est grand, et passe pour un trait d’esprit. Mon porc s’appelle Socrate, donc Socrate est un porc… La conséquence, c’est un feed (mur de discussion) bourré de phrases qui ont l’air sensées mais qui sont au mieux sensationnelles, bien tournées… des punchlines lancées dans une fabrique à buzz. Nous, usager.ères, dans ce flux d’infos hyper rapide, nous avons tendance à laisser de côté notre esprit critique et à prendre pour vrai ce qu’on lit sans chercher à fact checker.* Twitter s’impose donc comme le relai d’un système de domination, médiatisant toujours plus les mêmes acteur.ices, et par là, invisibilisant les prises de parole plus marginales. Un des dommages collatéral à ce fonctionnement, c’est un réseau social avec des contenus chauds, non-sourcés, dans lesquels s’inscrit des tendances réactionnaires au racisme diffus.
En tant qu’usager.ères, nous sommes toustes responsables ou complices de ce fonctionnement. En effet, même si la plupart du temps, ce sont les algorithmes qui influencent notre comportement, parfois, notre comportement PEUT influencer les algorithmes. En effet, les propos les plus relayés ont une visibilité énorme et exponentielle*. L’extrême droite l’a bien compris, et est connue pour organiser des raids super efficaces sur les réseaux. Sa méthode, utiliser la surcharge médiatique qui pousse les algorithmes à donner une visibilité biaisée à des propos racistes et oppressifs. Missa (@missandria), parle de ce phénomène dans son article “militer sur les réseaux sociaux” *Lien à venir*. Liker en masse, partager en masse, faire remonter petit à petit des prises de paroles choisies sur le feed du plus grand nombre. Et malheureusement, sans traitement de l’info, c’est souvent la visibilité qui légitime les discours. Le projet de diplôme d’E.Pom “Black Twitter” est une critique de ce fonctionnement qui encourage une forme de malhonnêteté intellectuelle. Son projet examine “ l’émergence d’un Black Twitter en France, qui est le surnom donné à des interactions vastes et hétérogènes qui néanmoins s’agglutinent autour d’expériences collectives d’assignations racialisantes, de misogynoir, de patriarcat-colonial et autres asymétries de pouvoir. Les Black Twitter ne désignent pas toutes les personnes Noires de la plateforme, mais davantage celleux qui performent, participent aux échangent, relayent des hashtags activistes, créent des mouvements internationaux, créent des tags etc…” (Estelle Pom) Une manière de rajouter de la complexité pour mieux appréhender les sujets sociaux par des points de vue moins unilatéraux.
“Les Black Twitter ne désignent pas toutes les personnes Noires de la plateforme, mais davantage celleux qui performent, participent aux échangent, relayent des hashtags activistes, créent des mouvements internationaux, créent des tags etc…”
Estelle Pom
Puisqu’on parle de racisme diffus, une question centrale dans cette réflexion est la question de l’appropriation culturelle et par extension, de propriété intellectuelle. Dans les tweets notamment, il est tentant d’utiliser des citations, voire savoir et théories… pour appuyer son propos, comme je l’ai fait en introduction. Ça fait tout de suite super sérieux, et puisque ça a été dit avant, c’est que c’est vrai (n’est-ce pas?). Et nous, dans nos pratiques, citons-nous toujours les auteur.ices ? De qui sont ces citations ? Estelle Pom et Loraine Furter insistent sur le problème du plagiat de personnes blanches (personnalités politiques, journalistes, créatif.ves…) s’appropriant des positions, travaux, citations, produites par des personnes qui subissent le racisme, le sexisme, le patriarcat-colonial, l’homophobie et le validisme. Ce qui est problématique là dedans, c’est qu’on s’approprie des propos qui ne sont pas les nôtres, et c’est encore une démarche coloniale. À l’inverse, se réapproprier une culture qui nous est propre et dont on a été démuni.es, est une démarche d’empouvoirement* J’ai envie de citer encore une fois Lou de @la.charge.raciale, pour qui, en tant qu’asiatique adoptée par des parents français, a eu besoin de se réapproprier la culture de son pays d’origine, en apprenant à cuisiner, en rencontrant sa communauté, etc… C’est une vraie démarche de construction identitaire et d’individuation absolument nécessaire pour se libérer du “regard blanc” (Mati Diop, Le regard blanc, dans le podcast Les Dérangeurs).
Mais à qui profite l’appropriation culturelle ? En réalité, il y a toujours cette question de fond à garder à l’esprit, peu importe le contexte ou le sujet : Qui parle ? Au nom de qui ? Qui bénéficie de ces propos ? Car en se questionnant là-dessus, on se rend compte qu’il y a toujours des réponses. Encore une fois, rien n’est neutre.
Rien de nouveau sous le soleil : l’histoire se réécrit lentement, et nous sommes toustes enclin.Es à reproduire des comportements oppressifs. En fait, l’hégémonie* culturelle est partout et se retrouve dans nos propres comportements même après effort de déconstruction et d’éducation. Personne n’est à l’abri de tenir des propos ou des actions qui peuvent être contre-productif à une logique décoloniale ou féministe. Il faut rester vigilant.e et savoir se retourner.
Féminisme et déconstruction patriarcale.
All-male panel. Si tu ne sais pas ce que c’est (j’avoue j’ai appris ce terme pendant la conférence), je te renvoie à la définition en bas de page. Ici, nous diront juste que c’est profondément quelque chose à éviter dans une lutte féministe. Or, nous sommes tellement imprégné.es de la culture patriarcale (et vraiment, on ne peut pas se jeter la pierre), que s’en extraire est parfois un processus long et difficile. Exemple. L. Furter était responsable de la programmation du FIG (fest de graphisme), et le constat est vite tombé : la prog était exclusivement masculine. En s’en rendant compte, elle a réagi et reconfiguré les choses en réintroduisant des actrices du design graphique pour finalement en faire une programmation féministe badass. Voilà. Et j’ai trouvé cool d’en parler car on peut parfois avoir tendance à se culpabiliser sur ces sujets, à juger énormément des personnes pour leurs actions ou paroles, quand c’est juste une erreur de jugement et qu’on ne balaie pas des siècles d’oppression masculine d’un revers de main, simplement parce qu’on l’a voulu. Ça arrive. C’est un long chemin. Pour aller plus loin dans sa démarche, elle a créé un outil pédagogique pour contre-carrer ce genre de situation, qui pointe certaines situations dans lesquelles il faut être attentif.ves à l’égalité de représentation des minorités. Je renvoie ici vers l’article qui en parle. Dans la même veine, Le jeu de carte The Black School pose des questions permettant de générer des processus créatifs qui intègrent les problématiques culturelles et politiques. Images ↓
Il est essentiel de remettre en question concrètement l’omniprésence de l’esthétique blanche. Voici donc quelques pistes.
Hégémonie et esthétique blanche.
Je ne peux pas parler de tout ici, mais je vous remets en bas de page les références. Celle qui m’a marquée, c’est Ruben Pater et son “The Politiques of Design”, dans lequel il met en exergue le fait que la typographie occidentale a créé des typographies « ethniques » grâce à une méthode d’exotisation* des scriptes* occidentales, ce qui répond à une logique profondément coloniale. Une que l’on connaît très bien et qui répond à cette injonction, c’est la typo Papyrus, supposée égyptienne. Bim. Un monde s’effondre. Mais E.Pom précise : “Comic Sans, Curlz, Brush Script, Papyrus… Fait intéressant, dans des pays du Sud global comme aux Philipines, les petits commercant-es s’accommodent très bien de ces typos impéralistes et les utilisent dans leurs supports de communication. Iels s’en foutent et ça vide ces signes de leur charge raciste. C’est un vrai exercice que de désapprendre ce que les hommes suisses blancs bourgeois décrivaient comme laid, non-désirable, primitif et sauvage.” Source.
“C’est un vrai exercice que de désapprendre ce que les hommes suisses blancs bourgeois décrivaient comme laid, non-désirable, primitif et sauvage.”
Estelle Pom
Mais comment opère est ce processus d’exotisation dans la typographie ou le domaine de l’image ? Ce processus d’exotisation, c’est créer quelque chose que l’on qualifiera de « création ethnique » à partir de nos propres références et aprioris culturels issus de l’histoire coloniale raciste, et donc principalement à partir de clichés. Sans parler du fait qu’on a tendance à exotiser et fétichiser le graphisme vernaculaire sans créditer. À quoi pensez-vous quand je dis « typographie africaine »? Je vois la typo de Jurrassic Parc mais pas grand chose de plus. C’est choquant non ? Ce qui démontre bien mon influence occidentale au « racisme diffus » et mon manque total de culture vernaculaire africaine. C’est normal d’un certain point de vue, puisque j’ai suivi mon éducation en France, mais il n’empêche qu’il est urgent de s’instruire davantage pour décoloniser son propre regard. Jérôme Harris nous pose une question très pertinente à ce sujet : êtes-vous capables de citer 5 designereuses noir.Es en activité ? Encore une fois, moi non.
Dans le domaine du design graphique et de l’image, il y a des hiérarchies opérantes qu’il est urgent de questionner.
Hiérarchies et termes.
Par exemple, ces notions de « graphiste établi », « graphisme étudiant », etc, qu’on entend partout pour juger tel ou tel travail… sont-elles vraiment pertinentes ? Et du point de vue de qui ? De la même manière, quelqu’un pourra qualifier un graphisme comme « girly », quand son autrice le décrira comme « dégoulinant-clinquant ». On sent bien comme « Girly » déligitimise le contenu et la production de l’autrice, quand dégoulinant-clinquant parle d’une démarche et d’une esthétique assumée tirant sa source dans des références précises. Et c’est un grand écart de sens.
Les termes utilisés prennent ici une place fondamentale. « Diversité, métissage, inclusivité, profils variés, minorités, scriptes non-latins, art non-européen »… sont des termes qui peuvent être problématiques car ils sont définis à partir d’une norme. Le fait de désigner quelque chose à partir de sa propre norme amène à qualifier des principes à travers sa négation, quand il s’agit de principes à part entière. L’art non-européen… Désigne-t-il l’art oriental, africain, asiatique? Désigner les choses de cette manière amène à des raccourcis malheureux. Au fond, ce que l’on retient, c’est que l’on met tout l’art non-européen dans le même sac comme un art en « opposition à » (à nous), et c’est tout. C’en devient un gros bloc non-identifié que l’on sait juste différent, et finalement, un non-art. C’est ce qu’on constate également avec le terme “musique du monde”…
On peut citer Nontsikelelo Mutiti, formée au graphisme au Zimbabwé comme aux États-Unis, qui nous dit que le graphisme s’apprend avec le même canon de références Euro-centrées. Heureusement, de nouveaux soleils émergent, et des esthétiques ressortent ou se créent. Ainsi, l’afrofuturisme* est un courant littéraire et de pensée qui utilise et réinvente des esthétiques décoloniales, intersectionnelles et féministe. En effet, il propose des imaginaires en empruntant à la science-fiction pour penser son activisme ou sa pratique de design.
En renversant les termes, on en revient à cette question de renversement des hiérarchies. Figures de l’ordre moral, quoi de plus légitime que de déboulonner les statues ? « Je fais du design car c’est plus convenable que de brûler des voitures », nous dit Estelle Pom avec cynisme, réutilisant la phrase de la tribune “J’étouffe” écrite par le réalisateur Raoul Peck. C’est important de reconnaître que, si le design graphique organise les privilèges, il existe aussi des signes et usages de signes aussi affûté.es qu’une arme pour renverser les rapports de forces. Étudiant.es de l’image, nous avons appris que le design résolvait des problèmes sans se soucier de savoir d’où émanaient ces problèmes et selon qui ils posaient problème. Or, en le considérant comme tel détaché du reste, il fait parti intégrante du problème.
“Je fais du design car c’est plus convenable que de brûler des voitures.”
Vous trouverez donc en bas de page des références à lire, écouter ou voir, pour pousser la réflexion si le sujet vous a intéressé. J’ai dû couper un peu grossièrement dans le contenu de la conférence pour que cela ne soit pas trop indigeste à l’écrit. Mais j’espère que ce billet aura l’effet d’une petite éclaboussure de frais et pourra faire germer certaines réflexions.
Et ce petit mantra pour la fin : Qui parle ? Au nom de qui ? Qui bénéficie de ces propos ?
Références à lire, regarder, écouter :
☼ AIGA – Eye on design / graphiste zimbabwéenne
☼ Fania Noël / féministe militante panafricaine
☼ Projet Wikiafrica
☼ Réseau Design Justice
☼ The Black School / jeu de carte qui pose des questions permettant de générer des processus créatifs qui intègre les problématiques culturelles et politiques.
☼ Le Dérangeur / podcast afro « petit lexique en voie de décolonisation »
☼ Toni Harrison / prix Nobel de littérature
☼ Mati Diop / cinéaste « le regard blanc » à réécouter sur le podcast Les Dérangeur.
☼ Badass Libre font by Womxn.
☼ Multiscript – Emilie Aurat
☼ Octavia Butler – La parabole du summer.
☼ Josefa Ntjam
☼ Tabita Rezaire – Inner Fire / A white institution Guide
☼ Vocaltype.co
☼ Amandine Gay – réalisatrice et afroféministe
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Avertissement 1 : Cet article a été soumis aux regards des concerné.es, qui ont apporté leur précisions et commentaires, et a été co-écrit avec Estelle Pom. Merci !
Avertissement 2 : cet article s’adresse davantage aux professionnel.les du design, étudiant.es et interessé.es, et malgré mes efforts pour être limpide, je m’excuse d’avance pour les informations ou références qui seraient obtues pour des personnes amateures.
Merci à Estelle Pom et Loraine Furter. Yannis et Lorelou pour leur relecture précieuse.
Définitions :
** fact-checker : chercher à sourcer les faits ou les propos.
** hégémonie : suprématie d’une chose (un État, une pensée, une culture…) sur une autre.
** intersectionalité : notion de sociologie qui désigne la situation de personne subissant simultanément plusieurs formes de stratification, domination ou de discrimination dans la société (source Wikipedia). Une femme trans noire par exemple subit à la fois les stigmates dûs à sa transidentité, à son genre, et à sa couleur de peau, sur le plan professionnel, moral, intime et social. Le féminisme n’est pas forcément intersectionnel (peut exclure les prostituées ou trans par exemple), mais la lutte intersectionnelle est forcément féministe (se bat contre toute forme d’oppression, considérant que l’origine de cette oppression est souvent de même nature : capitaliste et patriarcal).
** « all-male panel » : terme qui nomme (enfin) des programmations exclusivement masculines, chose qui (avant) ne choquait personne.
** exotisation : « phénomène culturel de goût pour l’étranger » (Wiki) qui met en exergue une certaine fétichisation, basé sur des clichés raciaux et des projections culturelles, effet qui découle directement de la colonisation.
** Typographies scriptes : typographies propres au système d’écriture latin, créées à partir des particularités de l’écriture manuscrite, mais adaptées aux méthodes d’impression (les lettres ne sont pas liées les unes aux autres, sauf pour certaines ligatures). Les scriptes sont à différencier des cursives ou des typographies manuaires.
** afrofuturisme : esthétique qui caractérise une contre-culture noire et consiste pour Mark Dery (théoricien du terme), en « l’appropriation de la technologie et de l’imagerie de la science-fiction par les Afro-Américains ». Estelle Pom : “On trouvait que s’inspirer librement de la SF permettait de fictionner le réel : dans le concept de l’afrofuturisme, il y a la volonté de se guérir, comprendre la souffrance des autres, construire un ailleurs sur des bases ouvertes, profondéments anti-racistes et réceptives à la diversité des genres, bâtir de nouveaux rapports aux corps, connaître le passé pour construire le futur, d’être dans des formes de justices… Dans le champ du graphisme, ça se traduit par de l’éveil, des workshops, des collaborations en présentiel ou distanciel, du travail COLLECTIF en tout genre où on apprends à changer la manière dont on pense ET parle ET concevons au quotidien”
** décolonialisme : processus visant à démanteler toute domination liée à l’héritage des colonies occidentales ayant asservies les peuples sur un plan social, culturel, économique et humain.
** exponentielle : toujours plus grande.